mercredi 9 mai 2012

Les pierres peuvent s'effondrer, retourner à la ruine, rien n'est perdu tant que persiste le rêve.

Michel Le Bris dans "Un hiver en Bretagne"
Nous allons porter nos pas dans les traces des contrebandiers poursuivis par des douaniers sur un chemin portant désormais le nom de GR 34.

Après les chemins de St Jacques porteurs aussi de rêves, après le GR4 solitaire et grandiose, nous voilà sur un autre chemin, un chemin frôlant les flots, touchant le ciel, découpant la côte où nous (les deux Bernard) allons déchiffrer les vents et rêver la mer. 

La Bretagne, terre de mystères, cet autre Finisterre, aussi attirant que celui de Galice, nous la connaissons déjà pour l'avoir parcourue de long en large sur les chemins des douaniers ou ceux des fées, dans la forêt moussue de Huelgoat ou celle de Brocéliande, sur les granits rongés par les vents du Menez Hom ou ceux, roses, de Trégastel. Nous avons vu aussi le vols des nicheurs des baies poussés par le vent du large, entendu leur criaillement plaintif, les avons vu planer, piquer, tournoyer, leur bec tendu comme une flèche vers une invisible direction. Nous avons vu la beauté du monde, nous avons perçu la musique irréelle des rafales du noroit, nous avons été fouettés par les rafales des grains, nous avons humé l'odeur des joncs, des varechs et des ports, imaginé la vie des bretons d'autrefois, des marins revenant de l'enfer, des femmes courbées sur le champ entourant la maison, avec à leur trousse trois ou quatre marmots reniflant. Nous avons dans les yeux les couleurs de la mer, des verts sombres aux bleus indigo, des vagues de rage, des écumes blanches nous crachant au visage leur haine venue des profondeurs...
Mais nous n'avons pas tout vu. Cette fois-ci nous venons parcourir cette côte immensément longue et découpée, avec des yeux neufs, pour contempler encore et toujours, le jeu de la marée, nous perdre dans les slikkes* de sables, dans les graviers de salicornes, dans les vasières striées de chenaux, dans les prairies d'herbes rêches grouillantes de plancton, dans les herbiers où frissonnent la lavande et l'obione argentée, une plante rare, basse (15 à 30 cm) que l'on trouve encore dans la baie du Mont St Michel, qui aime les terrains salés, comme la salicorne, en limite de la ligne des marées hautes, au fond des estuaires, des baies ou de pannes dunaires ouvertes à la marée.
Nous partirons le 10 mai du Mont Saint Michel ou plus exactement de Pontorson à 9 km au sud du Mont St Michel (le GR34 part de Vitré, forteresse médiévale des Marches de Bretagne et se termine à le Tour du Lac après Vannes dans le Golfe du Morbihan) Nous nous arrêterons à Vannes si tout va bien et rentrerons par le train dans nos "douars" respectifs. 
 Nous allons rencontrer les gens de Bretagne, parcourir cette contrée Celte, où les hommes du néolithique ont laissé de très nombreuses traces de leur passage. **: dolmen, menhirs, cromlechs, cairns, allées couvertes, tumulus... à Carnac, Gavrinis, Barnenez et ailleurs dans toute la Bretagne.        Crée en 1791 pour lutter contre la contrebande, le GR 34 permet de longer la côte et d’épouser chaque crique, chaque avancée dans la mer. Depuis les digues des polders de la baie du Mont St Michel jusqu’aux étendues marécageuses de la presqu’île de Guérande, il visite les côtes bretonnes :
- la côte d’Emeraude : de la baie du Mont Saint Michel à Saint Brieuc,
- la côte de Granit Rose de Saint Brieuc à Morlaix, 
- les Abers et le chemin des phares de Morlaix au Faou,
- les Monts d’Arrée du Faou à Douarnenez par la presqu’île de Crozon,
- les côtes de Cornouaille de Douarnenez à Lorient, de la pointe du Raz aux Montagnes Noires,
- le littoral du Morbihan jusqu’à Vannes.
    
     Nous parcourrons les dunes, les plages, les pointes rocheuses, des côtes sauvages, les marais ... côtoierons toute la faune et la flore qui y vivent, sans oublier ...  la  coiffe des bigoudènes, les casquettes des marins, les paysans et leur goémon, les filles de Camaret et leur curé etc. et avant l’implantation des parcs d’éoliennes.

           Par le soleil et ses reflets sur l’eau,
           par le souffle du grand large et des embruns,
           par les rochers ruinés, 
           par le souffle du vent venu du grand ouest,
           par l’esprit de la Bretagne,
           par l'Argoat et par l'Armor,
           nous parcourrons 1659 km (1700 avec les détours involontaires)
           si les druides, sont avec nous.


Et ... malgré cela, malgré les expériences de longues randonnées que l’on peut avoir, il y a toujours ce pincement au cœur avant le départ, des questions sans réponses qui restent en suspens :
Ai-je bien tout préparé ?
Mon sac à dos est-il assez léger ? Aurai-je pu l’alléger encore ?
Suis-je toujours capable de marcher si longtemps ?
Que vais-je rencontré en chemin ?

L’appréhension de l’aventure qui approche, font des derniers jours avant le départ monter une certaine angoisse, un certain doute ; la peur de ne pas y arriver, d’avoir été trop ambitieux. Mais « aléa jacta est », personne ne nous pousse à faire cela, nous n’avons rien à reprocher à personne, nous sommes seul responsable (ça me rappelle quelqu'un) de notre décision et nous ne pouvons plus reculer… il faudra donc avancer, avancer toujours, marcher chaque jour encore et encore, même si la fatigue est là, si l’envie d’arrêter se fait sentir, même si le mauvais temps nous empêche de voir le paysage, même si l’on à mal aux pieds, même si l’on souffre de fatigue. Le mental compte parfois plus que le physique... quoique ! 

Alors … c’est parti pour un autre tour, le Tro Breiz (tour de Bretagne)
Bon vent à vous et  ken ar wech all (à bientôt par mail)

IRAFOK 

* vase, limon (mot hollandais)
** Cinquante mille dolmens ont été recensés dans le monde. Vingt mille d'entre eux se trouvent en Europe, où ils sont très nombreux dans certaines régions de France (environ 4500 dolmens disséminés dans une soixantaine de départements), surtout en Aveyron (1000 dolmens), Bretagne, Quercy avec 600 à 800 dolmens, Ardèche avec 800 dolmens dans ce seul département et le Languedoc avec au moins 600 dolmens. En France, on croit toujours que le plus grand nombre de dolmens se situe en Bretagne. Il n'en est rien car en fait le département de l'Aveyron, avec 1000 dolmens, en totalise à lui seul plus que toute la Bretagne réunie.
Le mégalithisme est une forme d'architecture que les peuples de la préhistoire récente à l'époque néolithique (environ 3500 à 2000 av. J.-C.) ont pratiquée un peu partout dans le monde, érigeant des monuments avec de grandes pierres (du grec méga = grand ; lithos = pierre). Le mégalithisme est ambigu, car il désigne à la fois l'art de construire les monuments, les « mégalithes », (dolmens, menhirs, cromlechs, cairns, henges, peulvens, tholos, allées couvertes, taulas des Baléares, brochs d'Écosse), la période au cours de laquelle ces édifices ont été érigés et leur étude par les scientifiques (archéologues, préhistoriens), qui tentent d'en comprendre le sens.
Cf. : "megalithes-breton.fr"

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